Les trous de ver ne seraient pas des raccourcis, au contraire
— Actualités du 30 avril 2019 —
En 1915, Albert Einstein présentait sa théorie de la relativité générale, une description révolutionnaire de la gravitation. Quelques semaines plus tard, il a reçu deux lettres d’un autre physicien allemand Karl Schwarzschild. Cette lettre contenait la première solution exacte aux équations de la relativité générale. Même s’il était impressionné par la solution de Karl Schwarzschild, Albert Einstein n’a pas compris immédiatement toutes ses implications. La solution de Karl Schwarzschild fait des prédictions difficiles à croire, des singularités gravitationnelles dont rien ne peut s’échapper, ce sont les trous noirs. On possède maintenant des preuves que les trous noirs existent, mais la relativité générale permet d’autre prédictions encore plus incroyables.
En 1916, Ludwig Flamm s’aperçut qu’il est théoriquement possible de connecter deux points distants à travers l’espace et le temps. Cette possibilité a été redécouverte par Albert Einstein et Nathan Rosen en 1935. C’est un phénomène qu’on appelle aujourd’hui les trous de ver. Rien ne prouve leur existence en dehors des mathématiques, mais les trous de ver fascinent cependant les physiciens et les écrivains de science-fiction. La recherche théorique sur les trous de ver était très populaire à la fin des années 1980 et au début des années 1990. En 1988, une équipe dirigée par Kip Thorne décrivait ainsi un trou de ver macroscopique stable et traversable, compatible avec la relativité générale. Cette porte permettrait le voyage à travers l’espace et le temps. Depuis cette époque, la recherche sur les trous de ver s’est beaucoup calmée, mais de temps à autre un article ravive le sujet.
Au milieu du mois d’avril, une équipe américaine a publié une étude sur les trous de ver traversables. Elle réaffirme que leur existence est possible ou au moins qu’elle n’est pas impossible. Selon Daniel Jafferis, voyager avec des trous de ver prendrait plus de temps qu’un voyage normal. Ce ne seraient donc pas des raccourcis. Les fans de science-fiction peuvent être déçus par cette étude, mais pas les physiciens. Le travail théorique autour des trous de ver pourrait permettre de créer une nouvelle connexion entre la relativité générale et la mécanique quantique.
L’unification de ces deux cadres théoriques est une des plus grandes quêtes de la physique moderne. Citons par exemple la conjecture ER = EPR formulée en 2013 qui a pour objectif d’élucider le phénomène de l’intrication quantique en imaginant que deux particules intriquées sont reliées entre elles par un trou de ver. Pour le moment ce n’est qu’une hypothèse très audacieuse, mais elle illustre la façon dont certains physiciens espèrent exploiter les trous de ver au profit de la physique théorique.
D’autres chercheurs pensent que les trous de ver pourraient apporter une réponse au paradoxe de l’information posé par les trous noirs et les radiations de Hawking. Même s’ils ne sont pas capables de nous faire voyager physiquement à une vitesse phénoménale, les trous de ver ont encore beaucoup d’intérêt pour la recherche et pourraient apporter des réponses à certains mystères de la physique.
Sources